Note conjoncturelle N°22: Objectif ZAN (zéro artificialisation nette)

Loi climat et résilience

Note conjoncturelle n°22: Objectif ZAN (Zéro artificialisation nette)

Loi climat et résilience

Comme attendu depuis plusieurs mois et après des semaines de consultation, le décret encadrant les modalités d’octroi d’une Autorisation d’Exploitation Commerciale a enfin été publié le 13 octobre 2022. A l’instar de nombre d’autres décrets depuis le début de l’ère « Macron », il a été rendu applicable dès le lendemain de sa parution.

L’objectif du ZAN y est clairement érigé en principe fondamental en renforçant significativement le pouvoir des préfectures, en allant plus loin que les modalités évoquées dans la précédente directive Castex d’août 2020…ce qui finalement ne permet pas de rendre le pouvoir aux collectivités territoriales comme évoqué dans le projet de loi 3DS.

Si le décret a le mérite de clarifier la situation en termes de procédure de demande selon les surfaces de vente : seuils des 3 000 m² et 10 000m² ; il ne remet pas en cause la précédente définition de surfaces artificialisées ou non.

Décret n° 2022-763

En effet, préalablement au décret du 13 octobre, celui du 29 avril 2022 s’attache à définir la
nomenclature des sols artificialisés selon le tableau ci-dessous :

Il en résulte donc clairement que des surfaces déjà imperméabilisées en raison du bati ou d’un
revêtement existant ou ayant existé, des sols déjà stabilisés et compactés ou constitués de matériaux composite, et même si elles sont herbacées ou occupées par une végétation qui a repoussé par « l’épreuve du temps », doivent être considérées comme artificialisées.
L’alinéa 5 de la définition des surfaces artificialisées laisse donc une porte ouverte à la poursuite de projet commerciaux et l’esprit de la loi pousse à la reprise de friche industrielle ou commerciale.


Cependant, nous faisons déjà l’expérience à travers nos récents dossiers que les préfectures retiennent difficilement cette interprétation avec notamment une difficulté à distinguer la notion
d’artificialisation de celle d’imperméabilisation. Les études de sols et de perméabilité vont donc
devenir fortement conseillées afin de soutenir scientifiquement les arguments avancés. Cela
permettrait d’éviter de rentrer dans la réponse parfois complexe aux critères dérogatoires du nouveau décret.


Nous pourrions même aller plus loin et vous conseiller d’effectuer certains travaux avant d’envisager un dépôt de dossier en CDAC, de continuer à privilégier les reprises de friches bâties ou encore d’optimiser l’occupation de vos fonciers actuellement utilisés pour du parking.

Décret du 13 octobre 2022

A travers le décret N°2022-1312, tout projet qui artificialiserait un sol ne pourrait se voir délivrer une AEC sauf à prouver qu’ils remplissent certains critères dérogatoires.

NB : Cela signifie que pour les projets ne prévoyant pas d’artificialisation des sols, il faudra, malgré tout, que le dossier de demande en CDAC présente clairement un bilan des surfaces artificialisées avant/après projet et de la même manière, pour les surfaces perméables/imperméables.

A minima 3 critères dérogatoires devront être obligatoirement réunis dont les 2 premiers ci-après :

1) La justification de l’insertion du projet dans l’urbanisation environnante, notamment par l’amélioration de la mixité fonctionnelle du secteur, et de sa conformité avec les règles d’urbanisme en vigueur, ainsi que la justification de l’absence d’alternative à la consommation d’espace naturel :
ce critère parait assez simple à mettre en œuvre et à prouver à l’aide d’une carte présentant la
continuité urbaine et dans la mesure, où des efforts sont clairement réalisés afin de densifier
l’occupation des sols et assurer la compacité du projet ;

2) Une description de la contribution du projet aux besoins du territoire en s’appuyant sur l’évolution démographique, le taux de vacance commerciale et l’offre en m² commerciaux au sein de la zone de chalandise : nous sommes là précisément dans le cœur des éléments à développer au sein de l’analyse d’impact économique obligatoire depuis le 1erjanvier 2020 avec enfin, clairement, énoncer le retour des données de densités commerciales. Si celles-ci, tout comme l’évolution démographique, ne seront pas discutables, le taux de vacance commerciale méritera toujours d’être qualifié par la nature et l’origine de la vacance. De même, il pourrait être utile de renforcer l’analyse par la nature et le positionnement qualitatif de l’équipement commercial en place.

Afin d’étayer l’argumentation, pour ne pas la réduire à un simple listing d’enseignes, nous vous conseillons même la réalisation d’un sondage auprès de la population résidente afin de mieux
percevoir les manques actuels et ses attentes.

3) Le 3ème critère à remplir demeure alternatif parmi les 4 ci-dessous :

a) Soit la justification de l’insertion du projet dans un secteur d’une opération de revitalisation du territoire (ORT) ou dans un quartier prioritaire de la ville : une carte recoupant
l’information et la situation géographique du projet, disponible en mairie ou via le PLUi, devra être présentée. Pour rappel, les ORT sont des conventions signées entre les communes ou communautés de communes et l’Etat (par l’intermédiaire de la préfecture) issues généralement des dispositifs « Action Cœur de Ville » ou plus récemment « Petites Villes de Demain »- attention, certaines des villes concernées n’ont pas forcément encore transformées le dispositif en convention ORT ou bien même définies de périmètre géographique ;

b) Soit la justification de l’insertion du projet dans une opération d’aménagement au sein d’un
espace déjà urbanisé : là encore, une carte pourra justifier du critère. Les opérations
d’aménagement sont publiées assez clairement au sein des SCoT et/ou PLUi locaux. Les EPCI
ou autrement dits communautés de communes ou d’agglomération ont toutes reçues
l’obligation de redéfinir leur SCoT et par voie de conséquence probable leur PLUi dans un délai
de 6 ans depuis la parution de la Loi Climat et Résilience (2021) : en tant que porteur de projet,
vous pouvez peut-être influer sur ces documents en prenant contact avec vos élus locaux et
donc permettre à vos projets d’intégrer une telle opération ;

c) Soit la justification de mesures visant à compenser l’impact de la transformation d’un sol
non artificialisé en sol artificialisé. Le législateur précise que cette équivalence sera appréciée
en termes quantitatifs et qualitatifs avec un solde au moins nul voir positif. Par ailleurs, elle
doit être réalisée dans un périmètre à proximité immédiate du projet (on peut penser à
l’échelle de la commune) et prioritairement dans des zones de renaturation préférentielles
lorsqu’elles ont été identifiées dans les documents de planification. Nous sommes ici en plein
cœur de l’objectif du ZAN ! On peut là encore penser que la reprise et dépollution de friches
devra être priorisée. Nous vous encourageons donc, d’ores et déjà, à vous intéresser à cellesci et nous pouvons vous accompagner dans leur repérage. La manipulation ne demeurant pas
pour autant aisée, il conviendra, là encore, d’étudier l’optimisation de vos parcs de
stationnement si vous en possédez ;

d) Soit la justification de l’insertion du projet au sein d’un secteur d’implantation périphérique
ou d’une centralité urbaine, identifiée dans le document d’orientation et d’objectifs (DOO)
du SCoT, ou au sein d’une zone d’activité commerciale délimitée dans le règlement du PLUi
entrés en vigueur avant le 23 août 2021 : sur ce critère, les porteurs de projet ne pourront
clairement plus agir mais là encore, la justification à travers la présentation d’une carte sera
assez simple.

Catégorisation des projets et procédure

Au-delà de l’objectif du ZAN et des critères dérogatoires possibles, le décret a segmenté la procédure demande d’AEC selon la surface des projets.


Ainsi, pour les projets ne dépassant pas les 3 000 m² de surface de vente par création ou extension d’un existant, la procédure de demande d’AEC est exactement identique à ce qui était réalisé avant le 14 octobre 2022.
Pour les projets engendrant une artificialisation des sols et portant sur une surface de vente comprise entre 3 000 et 10 000 m², la procédure de dépôt du dossier de demande reste inchangée. Néanmoins, le projet nécessitera un avis conforme du préfet au moins 5 jours avant la tenue de la CDAC. Sans transmission de cet avis, celui-ci sera réputé défavorable. Il est fort à parier que certaines demandes resteront donc silencieuses.
Nous sommes là dans un cadre encore jamais vu, puisque cette procédure n’exonère aucunement le porteur de projet de toutes les démarches habituelles et ne propose aucune solution de recours.
Nous restons également circonspects sur cette procédure qui ne nous semble finalement pas aller dans le sens du projet de loi 3DS (différenciation, décentralisation et déconcentration), et son esprit de simplification, qui doit contribuer au renforcement du pouvoir local.
Nous pouvons également regretter le manque d’initiative à réduire l’écart de traitement entre
commerce physique et digital puisqu’à date les pure-players et black store demeurent finalement considérés comme de simples logisticiens.
Dans le cadre des projets supérieurs à 10 000 m² (comptabilisant également les surfaces déjà
existantes dans les ensembles commerciaux), rappelons que la surface de vente maximale à demander autorisée est de 1 000 m² : sans que cela ne soit clairement écrit dans le décret, nous pouvons supposer que la procédure d’instruction sera identique à celle des projets dont la surface de vente est comprise entre 3 000 et 10 000 m²

Conseil Polygone :

Afin de vous accompagner au mieux dans vos projets, nous vous enjoignons à nous contacter avant toute démarche administrative ou contractuelle. En effet, avant d’engager la réalisation d’un dossier de demande en CDAC, il nous apparait désormais impératif de vous fournir :

  • Une analyse urbanistique de votre projet au regard de la compatibilité avec les documents d’urbanisme locaux (SCoT, PLUi, ORT, OAP) et les critères dérogatoires au ZAN le cas échéant;
  • Une étude de marché regroupant l’analyse des données démographiques, des densités commerciales et une cartographie des pôles commerciaux existants. Celle-ci pourrait, selon ses résultats, être complétée d’un sondage auprès des résidents de la zone de chalandise ;
  • Un relevé des friches de la zone d’attrait du projet afin de vous aider soit à trouver un site
    d’implantation idéal, soit un foncier à renaturer.

 

Saisine de la CDAC par les communes
L’article 6 du décret stipule déjà que la saisine de la CDAC par une commune de moins de 20 000 habitants est possible pour des projets dont la surface de vente (seule ou dans un ensemble
commercial) serait comprise entre 300 et 1 000 m². Cette saisine sera désormais possible pour toutes les communes lorsque le projet engendre une artificialisation des sols

Bilan Polygone à fin octobre 2022

Depuis le début de l’année 2022, notre taux de réussite de demandes d’autorisation d’exploitation commerciale en CDAC est de près de 90%. Nous constatons en parallèle une forte augmentation des recours (certaines enseignes se sentant particulièrement menacées et utilisant ce moyen de défense quasi systématiquement et parfois aveuglément) : cela conduit quasiment les 2/3 de ces dossiers acceptés à la CNAC. Parmi les dossiers sur lesquels nous avons travaillé et instruits par la CNAC, 45% sont acceptés, 29% sont refusés et 21% font l’objet d’un refus avec clause de revoyure (les 5% restants ont fait l’objet de renoncement du porteur de projet). On peut penser que la statistique nationale est
relativement proche de la nôtre.

Pour rappel : Le refus avec clause de revoyure permet au porteur de projet de « re-déposer »
directement sa demande auprès de la CNAC. Un formalisme est cependant à respecter : présentation d’une synthèse des améliorations apportées et, prévenance de la préfecture du département concerné et des requérants avec (nous consulter pour explication directe des délai et courriers à respecter).

Le dépôt de pièces complémentaires, voire la substitution, au PC initial ou bien même un re dépôt de PCAEC pourra être nécessaire. De même, un approfondissement ou une mise à jour des données de l’analyse d’impact économique pourra être impératif. Cette procédure, plus directe et évitant l’étape d’un nouveau dépôt en préfecture, aboutit majoritairement à un succès dans la mesure où une réponse adaptée est fournie aux motifs du refus initial.

Cette note conjoncturelle est le fruit d’une collaboration entre :

Sébastien DUPIN

Chargé d’Affaire Associé

Jean COURRECH

Avocat

 
 

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